Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910
Organe Officiel De L'exposition, Vo.l 1
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sted: Bruxelles
Sider: 452
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
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L’EXPOSITION DE BRUXELLES
historiques ou religieuses par les peintres de la
grande époque de la Renaissance, arrangé, soi-
disant embelli, mais en réalité affadi, par les
italianisants qui l’ornèrent de ruines antiques.
C’est le XIXe siècle qui devait le débarrasser de
ses vains ornements, le séparer des accessoires
parmi lesquels nos yeux plus clairvoyants le
reconnaissent à peine aujourd’hui, lui rendre sa
beauté et sa fraîcheur natives.
Il est juste de rappeler cependant qu’au début
du XIXe siècle les paysagistes restent les esclaves
des vieilles formules. Ils peignent froidement
des sites qu’ils n’ont pas vus. La campagne
est pour eux quelque chose de vague et de
lointain, qu’ils composent avec habileté, mais
sans souci de la réalité. De là une sécheresse
de coloris, une absence d’impression, qui fait
qu’aujourd’hui nous passons indifférents devant
ces conceptions artificielles.
Des noms plutôt que des œuvres jalonnent
cette route de l’art qui de D’Arthois à Hippo-
lyte Boulenger et à ses précurseurs unit l’époque
classique à la période moderne, ce sont les noms
de Van Assche, de De Jonghe, de Hellemans.
Le mouvement romantique qui, dans une juvé-
nile ardeur, avait entrepris de débarrasser l’art
et la littérature des vieilles formules, exerça sur
le paysage son influence évolutive. Faut-il rap-
peler ici l’importance du courant d’idées qui
nous vint de France ? La révélation de la nature
vraie, préparée par l’étude des maîtres hollan-
dais Ruysdael et Hobbéma, du peintre anglais
Constable, par les tentatives des français Michel
et Huet, par les œuvres de Daubigny, de Théo-
phile Rousseau, de Corot, de toute l’école de
Fontainebleau ? Il faut diviser chez nous, comme
en France d’ailleurs, en deux groupes les ar-
tistes qui participèrent à cette évolution ; l’un
comprendra les peintres qui forment la transi-
tion entre les anciennes et les nouvelles écoles,
l’autre ceux qui furent les véritables précurseurs.
Les premiers avancent timidement dans la voie
nouvelle. Certaines formules les retiennent en-
core. Ils procèdent des vieux maîtres. Ils com-
posent encore avant de regarder. Ils aiment les
vastes espaces, les groupements habiles qui réu-
nissent dans le même cadre les aspects les plus
divers de la nature. Il y manque encore une
originalité, une personnalité plus grande de l’ar-
tiste, qui ne fait que commencer à voir et à
sentir. Puis les tons sont souvent noirâtres ou
ocreux. Ils reflètent presque tous une mélan-
colie qui par le recul des années peut aujour-
d’hui exercer sur nous un certain charme. Le
paysage est triste, il n’a pas de lumière.
Cette école romantique du paysage compta
dans son sein des peintres remarquables, dont le
nom et les œuvres ne sont pas oubliés aujour-
d’hui. C’est Joseph Quinaux, né à Namur en
1822, mort à Schaerbeelc en 1895, dont le
Musée de Bruxelles possède le Gué sur la Lesse
et une Vue prise dans le Dauphiné^ Jacob-
Jacobs (Anvers 1812-1879), dont on peut voir
la Chule de Sarp sur le fleuve Glommen dans
la même collection ; Jean Kindermans (Anvers
I822-Bruxelles 1876), avec sa vue prise dans
la Vallée de l’Amblève., aux larges, et soyeux
horizons, et sa grande composition dé-
corative aux ruines antiques ; Frans
Keelhoff (Anvers 1 820-Bruxelles 1 891) ;
Edouard De Schampheleer (Bruxelles
1824-1899), Le vieux Rhin, près de
Gouda (Musée de Bruxelles) ; Alfred
de Knyff, dont on admira les belles
colorations ; François dç Lamorinière
(Anvers 1828), qui eut son heure de
célébrité, bien que de nos jours nous
trouvions son coloris peu naturel et
sans éclat. Sa Vue prise à Edeghem,
son Etang à Putte présentent tous les
défauts et toutes les qualités du temps,
et ce soin du détail acquis au détriment
de l’impression qui permettrait à un
œil exercé de compter les cailloux du
sentier et les branches des arbres.
Mais la Belgique allait avoir bientôt
son école régénératrice. Coïncidence
curieuse, cette école prendrait comme
celle de France le nom d’un petit vil-
lage pittoresquement situé à l’orée des
bois profonds et mystérieux. Elle naî-
trait de la forêt charmeuse et protec-
trice, accueillante à ceux qui l’aiment
et la pénètrent. La forêt de Soignes
inspirerait de nouveaux peintres, Comme
là-bas Fontainebleau avait fait surgir
une nouvelle génération d’artistes. Ter-
vueren serait notre Barbizon.
Cet événement si important dans l’évolution
de notre art contemporain se produisit d’une
manière toute fortuite. Le hasard, ou plutôt
cette nécessité des temps qui nous impose pour
ainsi dire les révolutions quand leur heure est
venue, fit cela très simplement. Un homme mo-
deste, Joseph Coosemans, qui remplissait les
fonctions de secrétaire communal et de receveur
du bureau de bienfaisance de la petite localité
de Tervueren, occupait ses loisirs à peindre les
paysages dans l’ambiance desquels il vivait. Il
peignait ces choses, les frondaisons perlées du
bois, les sources chantantes au cœur de la forêt,
son pouls et sa joie, l es larges crépuscules qui
pénètrent à travers l’envol des branches, les
mares solitaires lourdement assoupies dans les
clairières ombreuses, ou les sentiers ocreux que
tache, par endroits, en de grandes nappes de
lumière, la clarté du soleil ; il peignait toutes
ces choses comme il les voyait, comme il les
sentait, sans recherche et sans artifice. Mais
vint un artiste mieux doué encore, qui anima
cette solitude. C’était Hippolyte Boulenger, sorte
de paria de la destinée, qui avait mené jusque-là
une existence aventureuse. Il avait connu la
faim, les fatigues des pires labeurs, la douleur
de se sentir seul dans l’existence. Il travaillait
pour vivre, de ce métier de dessinateur dont des
privilégiés se faisaient un art, grâce auquel il
se créait, lui, une maigre pitance. Et, cependant,
une idée supérieure le guidait, c’était d’exprimer
l’émotion qu’il avait ressentie au contact de la
nature, de parler en termes plus clairs, plus vrais,
plus spontanés le divin langage qui s’élève des
prés, des bois et des sources.
La beauté du site forestier attira Hippolyte
Boulenger à Tervueren. Il se fixa dans le vil-
lage et ne tarda pas à se lier d’amitié avec
Joseph Coosemans, vers qui l’attiraient des ten-
dances et des goûts communs.
Boulenger vécut exclusivement pour son art,
se souciant peu de ses intérêts matériels. Il lui
arrivait parfois de payer par un tableau ses
frais d’hospitalisation, ne possédant pas le nu-
méraire nécessaire pour les acquitter autrement.
Cependant il ne cessait pas de produire. En
1861 une Vue d’Auderghem attira sur lui l’at-
tention ; en 1869 son tableau du Printemps
Hippolyte Boulenger. — Le Ruisseau.
qu’il exposa au salon de Bruxelles révéla son
action novatrice. Sa réputation s’affirmait de
plus en plus. Le bien-être lui venait par surcroît.
En 1872 il peignait V Allée des charmes, une
de ses meilleures œuvres, qui fixait définitive-
ment sa renommée.