Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910
Organe Officiel De L'exposition, Vo.l 1
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sted: Bruxelles
Sider: 452
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
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L’EXPOSITION DE BRUXELLES
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par une secrète terreur, a cessé ses joyeuses
gambades. Il se tient auprès de son maître,
comme pour lui demander une défense. Le pas-
teur, sorte de philosophe rustique et pitoyable,
porte dans ses bras un jeune agneau, vers qui
bêle sa mère. Une croix de pierre, placée au
détour du chemin, étend sur les êtres que do-
mine la crainte de l’orage prochain ses bras
protecteurs. Il y a du sentiment sur cette toile,
une élégance aussi, un poète de la manière de
Brizeux, par exemple, en eut très exactement
traduit le caractère et l’impression.
Louis Robbe, né à Courtrai en 1806, étudia
le droit, se fit recevoir avocat, puis bientôt
délaissa le métier de la chicane pour se consa-
crer à la peinture. Il peignit des animaux, vaches
aux pâturages, taureaux luttant contre des
meutes de chiens. Il eut plus d’énergie et de
puissance que Verboeckhoven, son maître.
Alfred Verwée, qui naquit à Bruxelles en 1838
et y mourut en 1898, a des qualités plus solides
encore. Les animaux qu’il place au bord de la
large nappe de l’Escaut, dans les grasses prai-
ries de Flandre, ont la douceur résignée de ces
bêtes somnolentes qui, comme le dit le poete,
poursuivent un rêve commencé qu’ils n’achèvent
jamais. Les cieux qui couronnent ces paysages
sont largement brossés. Sa composition est
large ; son coloris vibrant, solide, participe de
la richesse de ces gras pâturages qui, sous sa
palette, acquièrent une ampleur magnifique.
Une place plus importante parmi les anima-
liers doit être réservée à Joseph Stevens. Ce
peintre, qui fut également un aquafortiste excel-
lent, était né à Bruxelles en 1819. Il fut l’élève
de Robbe. Son père était un amateur d’art
éclairé. De ses deux frères, l’un était Alfred
Stevens, le peintre de genre bien connu, 1 autre
Arthur Stevens, un critique d’art très apprécié
en son temps. Joseph Stevens avait donc de
qui tenir. Après un séjour de quelques années
à Paris, où il se lia avec la plupart des artistes
français et subit assez fortement l’influence de
Descamps, il revint à Bruxelles, déjà honoré
et presque célèbre. Jusqu’en 1892, date de sa
mort, il ne cessa de produire de ces œuvres où,
sous son pinceau, les animaux prenaient une vie
intense, dont la description picturale avait été
inconnue jusqu’alors.
Joseph Stevens s’est incliné vers nos frères
inférieurs ; il les a regardé vivre, aimer et
souffrir ; il a reçu la révélation de leurs ins-
tincts et c’est leur vie même qu’il nous livre.
Son observation est pénétrante, son talent sans
miévrerie ni sentimentalité. Il nous force à
nous intéresser toujours aux animaux qu’il nous
dépeint, à les aimer souvent. Il nous montre
chez eux les passions, les qualités et les défauts
qui se rencontrent chez les hommes, et cette
communauté de force et de faiblesse nous attire
et nous retient au spectacle de leurs actes.
Un boule-dogue aux mâchoires puissantes, au
torse robuste, protège contre les mauvais des-
seins d’un chien de trait le petit griffon de ses
maîtres, pauvre roquet de salon, qui se pelo-
tonne contre le mur et que la robe opulente
marquée d’une couronne défendrait mal contre
les entreprises de ce mâtin prolétaire. Cette ani-
malité si vivante se divertit parfois. Un spitz
poursuit une mouche qui se moque de ses atta-
ques. Le chien tend tout son corps dans l’ardeur
du combat. Son poil se hérisse, ses pattes sont
distendues dans l’attente du saut hardi qui lui
donnera la possession du volatile convoite.
Tout autour, de menus ustensiles de ménage,
un sceau, un balai, une éponge, une brosse,
situent le lieu de cette tragi-comédie.
Il nous peint encore les chiens misérables,
parias d’une animalité qui possède, elle aussi,
ses prolétaires et ses aristocrates. Le matin, à
l'aube, quand tout sommeille encore, les chiens
vigilants vont par les rues désertes à la re-
cherche de la maigre pitance que les débauches
du soir leur ont abandonné. Ils trouvent dans
les tas d’ordures jetés à la porte des restau-
rants les victuailles oubliées, sortes de gagne-
petit de la race canine que sollicite le besoin
de vivre. Des sentiments plus élevés les agitent
aussi. Le petit savoyard vient de succomber à
la misère. Sa musette gît à ses côtés. Le
monde indifférent l’a oublié. Seul son chien,
pauvre être famélique, veille le corps inanimé,
dernier ami d’une longue misère.
Dans cette évocation de tout un microcosme
d’animaux partageant nos passions, nos souf-
frances, il y a une véritable émotion d’artiste,
un grand talent apparaît, une âme puissante se
révèle. D’ailleurs, au mérite de la composition
se. joint l’habileté technique d’un maître. Les
toiles s’animent de tons chauds, pleins de force,
où se reconnaissent les traditions des peintres
les plus glorieux de la terre flamande.
Un autre animalier s’acquit encore une grande
renommée, c’est Charles T’Schaggeny (Bru-
xelles 1815-1894), élève de Verboeckhoven.
Quelques toiles ont popularisé son nom, entre
autres la Malle-poste des Ardennes et la Montée.
Ce sont des œuvres vigoureuses, où passe une
vie ardente, des attelages de chevaux anhélants
et forts, traînant après eux dans une course
rapide de lourds véhicules. Son frère Edmond
T’Schaggeny (Bruxelles 1818-1873) cultiva le
même genre. Le Musée de Bruxelles conserve
de lui une toile : le Taureau.
Quelques peintres divers
L’atelier Portaels.
Avant d’aborder l’époque contemporaine, nous
citerons quelques artistes qui, dans des genres
divers, affirmèrent leur maîtrise : Charles Her-
mans (Bruxelles 1839), auteur d’une toile restée
célèbre, A l’aube, d’un réalisme étudié, d’un
effet saisissant ; Félix de Vigne (Gand 1806-
1862), le Dimanche matin en hiver, du Musée
de Bruxelles ; une série de peintres influencés
par les écoles allemandes de Munich et de
Dusseldorf : Louis Delbeke, peintre de sujets
historiques et satiriques (Poperinghe 1821-
1891), qui décora les halles d’Ypres en colla-
boration avec Jean Verhas ; Godefroid Guffens,
peintre d’histoire (Hasselt 1823-1901), qui
exécuta, en collaboration avec Jean Sweerts
(Anvers 1820-1879), de nombreuses peintures
murales dans des églises d’Anvers, de Saint-
Nicolas et de Courtrai, ainsi qu’aux halles
d’Ypres. Citons encore Edouard Hamman
(Ostende 1820), peintre d’histoire, élève de
De Keyser ; Ooms (Desschel 1845-1890), au-
teur du tableau célèbre La Lecture prohibée ;
Ferdinand Pauwels (Eeckeren 1830), dont on
peut voir au Musée de Bruxelles La Veuve de
Jacques Van Artevelde faisant une offrande à la.
Patrie ; Albert De Vriendt (Gand 1843-1900),
Hommage rendu à Charles - Quint enfant ;
Charles Verlat (Anvers 1826-1890), qui donna
du réalisme à la peinture religieuse.
Vers 1868, un peintre, Jean Portaels (Vil-
vorde 1818-1895), dirigeait à Bruxelles un
atelier célèbre. L’artiste avait produit, dans des
œuvres estimées, mais ce qui fut son principal
titre de gloire, c’est d’avoir formé des élèves à
qui il sut imprimer une tradition et dont il
sut diriger ses efforts. Elève de Navez, il prit
de son maître le goût de la composition qu’il
anima et conforma au goût de son époque.
Certes, sa toile célèbre de la Loge au théâtre
de Pest, sa Fille de Sion, son Simoun nous
paraissent démodés, mais ils plurent en leur
temps par leur belle ordonnance, par le choix un
peu factice mais séduisant du coloris, par le
souci constant de présenter une scène savam-
ment étudiée. C’est de son atelier que sortirent
Léon Frédéric, André Hennebicq, Impens, David
et Pierre Oyens, Joseph Verheyden, Emile Wau-
ters, bien d’autres artistes encore qui prépa-
rèrent l’école contemporaine.
Arthur De Rudder.