Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910
Organe Officiel De L'exposition, Vo.l 1
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sted: Bruxelles
Sider: 452
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
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L’EXPOSITION DE BRUXELLES
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et difformes, destinés à montrer aux visiteurs une
Saràh Bernhardt, un Victor Hugo et l’assassin ou
le criminel à l’ordre du jour. Il comptait étudier
et exprimer sérieusement les particularités de
l’attitude de chacun de ces personnages. Et non
seulement il les aurait modelés avec soin en
employant des moulages d’après nature, mais il se
serait procuré, pour vêtir ses héros, les habits
qu’ils avaient portés, leurs chaussures, bref tous
les détails de leur toilette !
Bien que l’entreprise n’eût pas de suite, Lam-
beaux resta cependant
à Bruxelles.
C’était en 1881 et le
statuaire avait alors
29 ans.
Après une nouvelle
série de déceptions au
cours desquelles, tout à
fait découragé, il eut,
paraît-il, l’idée d’aban-
donner la sculpture pour
se faire simple marin,
l’heure des premiers
triomphes, largement
mérités, devait enfin
approcher.
Grâce à l’intervention
généreuse de quelques
esthètes raffinés, Lam-
beaux trouve enfin les
ressources nécessaires
pour commencer l’exé-
cution d’un des projets
grandioses qui brûlaient
dans son esprit. C’est
alors qu’il exécute son
premier chef-d’œuvre et
certainement, comme
travail, un des plus ca-
ractéristiques qu’il ait
signés : nous avons nom-
mé le Baiser, ce groupe
d’un réalisme serré, sé-
rieux, sévère, nerveux,
éminemment sincère,un
peu sec de lignes peut-
être, moderne, caracté-
ristique et naturel.
Cette œuvre person-
nelle, se rattachant par
les tendances aux Lut-
teurs qui suivirent, mar-
que la note la plus
caractéristique dans la
série des travaux de la
seconde « manière » du
jeune maître.
L’année suivante, en
1882, sur la proposition
du directeur des Beaux-
Arts feu Jean Rousseau,
le Baiser, coulé en
bronze, fut acquis par
le musée d’Anvers —
pour la modique somme
de 3,5oo francs.
Malgré tout, les premiers succès officiels
n’avaient pas apporté à l’artiste le Pactole, et lors-
que Lambeaux sentit la nécessité de visiter l’Italie
il fut encore obligé de s’adresser à ses protecteurs.
L’artiste partit vers la fin de l’année 1882 ; mais
11 ne resta pas longtemps dans la patrie des
Donatello et des Michel-Ange, parce que la mort
de son père le rappela brusquement en Belgique.
Néanmoins, c’est en Italie que Lambeaux, assu-
lement inspiré par les œuvres de Jean de Bologne,
dont la hardiesse flattait sa fougueuse imagination,
conçut le projet de cette Fontaine monumentale
qui devait un jour consacrer son talent et lui être
commandée au prix de 60,000 francs.
Ce fut toute une révolution dans son esprit.
Aussi n’eut-il aucun repos avant d’avoir trouvé un
atelier pour calmer sa fringale créatrice! L'Enlève-
ment des Sabines et les Fontaines réalistes de Jean
de Bologne lui inspirent alors tout de suite une
série de conceptions hardies, nerveuses, terribles :
le Viol, îa Débauche, etc. Dans son exaltation, il
rêve les lignes les plus mouvementées. Le Brabo
Jef Lambeaux — Les Passions Humaines (Fragment)
germe dans son esprit. Aucune entreprise ne
l’effraie. Il a la fièvre. Il travaille.
Revenu à Bruxelles, il expose successivement les
œuvres importantes qui feront date dans sa carrière,
de i883 à 1894 : la Folle chanson (Anvers 1884),
le Brabo (Anvers i885), la Fontaine représentant
l’allégorie de la ville d’Anvers (Gand 1886), YHu-
manité (Gand 1889), le Dénicheur d’aiglons (Bru-
xelles 1890), X Ivresse (Bruxelles 1893), etc.
Dans l’ensemble de cette individualité, nous dis-
tinguons trois grandes phases qui, tout en étant le
fruit du tempérament de l’artiste, résultent cepen-
dant de diverses influences du milieu. Ces influences
— auxquelles aucun maître ne saurait échapper —
mettent en lumière trois grands centres : Anvers,
Paris, Florence.
Dans le cours de la première phase, Lambeaux,
encore jeune, fait ce que l’on appelle de la « sculp-
ture habillée ». Il signe alors des groupes d’en-
fants assez humoristiques et déjà personnels, dont
nous avons parlé. L’une des meilleures œuvres de
cette catégorie est Un Accident, exposé à Bru-
xelles en 1875, alors
que le statuaire n’avait
encore que 23 ans!
La seconde phase
nous montre l’artiste su-
bissant l’influence heu-
reuse du milieu parisien.
Maintenant, après avoir
quitté Van Beers, il a
repris la pratique de la
sculpture, négligée de-
puis plus d’une année
et, renonçant à ses grou-
pes d’enfants, il aborde
carrément, avec l’étude
du nu, les difficultés du
réalisme moderne. Une
série de travaux, à la
fois hardis, personnels
et caractéristiques, par-
mi lesquels le Baiser et
les Lutteurs, résument
cette nouvelle période.
Dans le développe-
ment de la troisième
phase, enfin, l’artiste,
sans sortir du domaine
du réalisme, manifeste
d’abord une prédilection
accusée pour l’expres-
sion de la force et la
recherche des grandes
lignes mouvementées. Il
se souvient de Florence,
il étudie Jean de Bo-
logne qu’il arrive à
trouver même supérieur
à Michel-Ange et il mo-
dèle son Brabo. Plus
[ tard, dernière évolution,
le maître s’apercevant
qu’il a peut-être trop
négligé jusqu’alors la
pensée dans l’art au bé-
néfice de la ligne et de
l’anatomie, analyse Mi-
chel-Ange, auquel il de-
mande le secret de son
intellectualité sévère et
conçoit le bas-relief des
Passions humaines.
*
* *
A ces notes biographi-
ques qui racontent l’ef-
fort il convient d’ajouter
l’appréciation du maître écrivain Camille Le-
monnier, qui dit ce que fut l’homme, l’artiste.
On ne lira pas sans émotion les lignes suivantes
écrites au lendemain de la mort du statuaire :
« Oh! ce vivant d’hier, le plus vivant de tous
ceux qui chez nous maniaient l’outil sacré! Ce Jef
Lambeaux qu’on allait yoir, d’un bond nerveux.de
félin des petites races, se pendre à ses énormes
glaises et qui donnait si bien l’impression d’une
force capable de défier le temps! Cet extraordinaire
tempérament d’artiste qui, par toutes les bondes