L'exposition De Paris 1889
Troisième & quatrième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
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L’EXPOSITION DE PARIS
!)9
LE PAVILLON ESPAGNOL
DES PRODUITS ALIMENTAIRES
(Vue de la façade sur la Seine)
Nous avons déjà parcouru 1 les diverses salles
du pavillon monumental où l’Espagne a ex-
posé, à l’Esplanade des Invalides, ses vins et ses
produits alimentaires. Dans notre dernier nu-
méro nous publiions i$ne vue de la belle façade
de cet édifice, qui regarde la Seine.
Vu du fleuve, cet édifice rappelle les plus
beaux monuments historiques de la Nouvelle-
Castille. Deux tours carrées, flanquées d’élé-
gantes colonnettes et surmontées de gracieux
clochetons, s’élèvent aux extrémités d’un vaste
bâtiment en briques rouges et jaunes, dont les
bandes horizontales alternées rappellent le pa-
villon espagnol. Une construction plus massive
et plus fière, en briques rouges, rompt la mo-
notonie de ce bâtiment, percé de dix fenêtres
ogivales et le divise en deux parties égales.
Tandis que dans la partie inférieure de la fa-
çade, s’ouvre une file ininterrompue de croisil-
lons, surmontés de faïences multicolores, — de
délicates sculptures, véritables merveilles ar-
tistiques, couronnent la toiture. Les colonnettes
des tours encadrent de magnifiques faïences,
où des artistes d’élite ont reproduit des sujets
héroïques et représenté des cavaliers gigan-
tesques, montés sur un des chevaux fougueux,
ou des grands seigneurs debout, déployant des
étendards et brandissant la fameuse « lame de
Tolède ».
La partie centrale de ce palais, — car c’est
plutôt un palais qu’un pavillon, — est un sou-
venir de l’ancienne Puerta del Sol (porte du So-
leil), construction arabe digne de servir d’en-
trée à une cité comme Tolède, et qui fournirait,
à elle seule et sans qu’il fût besoin d’y changer
le moindre détail, le sujet d’un magnifique dé-
cor: c’est un des plus beaux spécimens du style
muzarabe.
Faut-il rappeler que l’on donnait le nom de
Muzarabcs ou Mozarabes aux chrétiens qui,
après la conquête, vécurent sous la domination
musulmane et qui suivirent le rite en usage du
temps des rois goths? De là vinrent les cha-
pelles mozarabes, dont l’architecture particu-
lière fut fort appréciée.
Parmi (es plus curieux édifices mauresques
de Tolède figurent aussi le Salon de Mesa (salle
à manger) et le Taller del Moro (l’atelier du
Maure), qui appartiennent au style architectu-
ral appelé en Espagne « mudejar ». Au moyen
âge, et surtout aux xiv° et xve siècles, on em-
ploya dans la Castille, l’Aragon et d’autres pro-
vinces des alarifes (architectes) mores, soumis
à la domination chrétienne et auxquels on
donna le nom de Mudejares, — c’est-à-dire
Maures vassaux de chrétien, — comme on
avait donné le nom de Muzarabes aux chrétiens
vassaux des Arabes. Souvent, lorsqu’ils étaient
employés comme architectes ou sculpteurs or-
nemanistes, les alarifes mudejares travaillaient,
soit à des constructions neuves, soit à des mo-
numents qu’ils réparaient, sans rien changer
à leur style habituel. Ce mélange de l’architec-
ture chrétienne et de l’architecture moresque
produisit un nouveau style, que les alarifes
employèrent en l’appropriant aux traditions et
aux habitudes chrétiennes.
Ce style, employé dans la péninsule beaucoup
plus tard qu’on ne pense généralement, se
1. N° 43,
retrouve dans la plupart des édifices, auxquels
M. Mélida a emprunté les détails de la princi-
pale façade du pavillon espagnol.
Cet architecte dotaient n’avait, d’ailleurs, que
l’embarras du choix. Chaque promenade dans
les rues étroites et enchevêtrées de Tolède
réserve au curieux des découvertes et des sur-
prises nouvelles : tantôt une ruine ou une in-
scription arabe, tantôt un écusson ou un frag-
ment de sculpture gothique, tantôt une porte
du moyen âge, garnie d’énormes clous de fer et
ressemblant au bouclier de quelque géant des
romans de chevalerie. Toutes ces réminiscences
se retrouvent sur la façade intérieure et dans
le portail massif qui s’ouvre au haut de l’esca-
lier.
La partie centrale de la façade sur la Seine
rappelle aussi la Puerta de Visagra (porte de la
charnière ou du gond), une des plus pittoresques
de Tolède. Une inscription latine, placée au
sommet de la voûte, apprend qu’elle fut bâtie
enl550, par ordre deCharles-Qaint. Au-dessus de
l’entrée sont sculptées dans la pierre les armes
d’Espagne, accompagnées d’un aigle gigan-
tesque aux ailes déployées, symbole adopté par
la ville de Tolède depuis le xm8 siècle. On
l’attribue à Berruguete et elle n’est pas indigne
d’un des plus grands sculpteurs espagnols de
la Renaissance.
Tous les guerriers figurés sur les écussons de
céramique qui décorent les tourelles, sont armés,
comme nous l’avons dit, d’une de ces longues
espadas toledanas, dont la renommée s’étendait
dans le monde entier, et dont l’acier provenait
d’une mine de fer située à une lieue de Mondra-
gon, dans les provinces basques : témoins ces
vers d’un poète espagnol :
Vencedora espada,
De Mondragon tus aceros,
Y en Toledo templada.
« Victorieuse épée, — de Mondragon est ton
acier, — et à Tolède tu fus frappée. »
Donnons, en passant, un souvenir au plus
ancien espadero tolédan connu, Julian, — sur-
nommé le More, parce qu’il était de Grenade,
où il travaillait, vers la fin du xv0 siècle, pour
le roi Boabdil. C’est peut-être lui qui fabriqua
les lames qu’agitent fièrement ces grands « guer-
royeurs ». Aujourd’hui, ces lames sont encore
d’excellente qualité, mais ce qui est perdu,
c’est le secret de la forme et de l’élégance; il
faut savoir gré à M. Mélida de nous en avoir
conservé au moins la mémoire.
V.-F. M.
L’ART A L’EXPOSITION
L’HORLOGERIE
L'horlogerie constitue officiellement la
classe 26 à l’Exposition Universelle ; mais,
pour l’étudier complètement, il est néces-
saire de faire des excursions dans d’autres
classes, de visiter le Bronze, l’Orfèvrerie
et la Bijouterie. Cette industrie est obligée,
en effet, de demander le concours des
artistes de ces divers métiers pour don-
ner une forme extérieure aux combinai-
sons mécaniques des savants. Dans une
pendule et dans une montre, ce qu’on
prise avant tout évidemment, c’est l’exac-
titude chronométrique ; l’objet, a été
acheté sous cette condition. Mais généra-
lement on ne reste pas indifférent au plai-
sir de compléter la satisfaction de ce be-
soin essentiel par la jouissance de l’a-
gréable uni à l’utile. C’est ici, plus que
partout ailleurs peut-être, que l’alliance
de la fantaisie avec la logique, des belles
formes extérieures avec le mérite de l’or-
ganisme interne, présente les exemples
les plus intéressants et fournit matière
aux observations les plus curieuses. Le
champ des applications artistiques de
l’industrie do l’horlogerie est plus vaste
que dans aucune autre. H va du monu-
ment au bijou minuscule. Un orfèvre ser-
tit, avec aisance, une montre à répétition
dans le chaton d’une bague, et il a fallu à
maître Jehan des Orloges un véritable édi-
fice pour loger, dans la cathédrale de
Strasbourg, son colossal chef-d’œuvre où
toutes les allégories de la philosophie et
de la religion font cortège aux planètes et
aux signes du Zodiaque. La science n’y
impose point à l’art des dimensions et des
formes rigoureuses. Aussi, nulle part ne
rencontre-t-on plus d’inventions origi-
nales, ingénieuses et pittoresques, et au-
tant de folies audacieuses, impertinentes
et ridicules. Après avoir, devant quelques
vitrines, rêvé des vieux maîtres du passé,
on se prend, devant d’autres, la tête dans
les mains, en se demandant avec anxiété
si l’on n’est pas chez dos aliénés.
Dans une étude d’exposition décennale,
ce qui est intéressant, c’est de chercher
à dégager la physionomie caractéristique
de la production d’une industrie. J’ai es-
sayé de le faire, mais je n’y ai point réussi.
En céramique, en orfèvrerie, en bijoute-
rie, etc., il m’a semblé qu’on pouvait dé-
terminer, sans trop de réticences, les ten-
dances des artistes, et même faire entre-
voir ce qui, dans cinquante ans, sera lo
style do la fin de ce siècle. Ici, on perd
entièrement son latin et, comme disait
Boileau d’un horloger de son temps, on
est forcé de s’avouer
........ l’homme de France
Qui sait le moins l’heure qu’il est.
Aucune section ne présente un pareil
galimatias de styles, d’inventions et
d’idées. Il y a de tout, dans ce caphar-
naüm, depuis la clepsydre de Vitruve
jusqu’au cadran pneumatique, en passant
par l’horloge du roi René et le coucou de
la Forêt Noire. Il s’est trouvé un indus-
trieloriginal, qui a imaginé de reproduire
ou d’interpréter d’après des gravures,
des peintures et des sculptures, soixante-
quinze vieilles horloges, en bois, en
fer, en cuivre et en bronze. On se croi-
rait au musée de Cluny, à la porte de
Hal de Bruxelles ou an musée germa-
nique de Nuremberg; Viollet-le Duc en
pleurerait de joie, s’il était encore de ce