L'exposition De Paris 1889
Troisième & quatrième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
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L’EXPOSITION DE PARIS
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certain nombre de sièges montés, décorés
de couronnes de fleurs d'une coloration
exquise, des fauteuils et des canapés exé-
cutés d’après les modèles de M. Chabal-
Dusurgey, un écran d’aprèsM. Gérômo qui
est d’un goût rare et d’un éclat superbe,
des panneaux d’après MM. Paul Collin,
Cesbron et Tony Faivre.
Tous ces ouvrages, il ne faut pas
craindrfe de le redire, sont d’une facture
irréprochable, et peuvent être considérés
comme des modèles dignes d’être imités.
Au point de vue technique^, les artistes
de nos Manufactures nationales n’ont
donc pas démérité de leurs ancêtres.
Après cela et assez loin en arrière, il
nous faut placer la double exposition do
M. Braquenié provenant de ses ateliers
d’Aubusson et de ceux de Malinos. Les
ouvrages envoyés par cette dernière
manufacture sont de qualité inégale. A
côté d’une copie assez faible des Maisons
Royales et de portra its d’un intérêt limité,
nous remarquons des panneaux décoratifs
d’une belle venue, et surtout une tenture,
la Députation des Gueux présentant sa
requête à la Régente, exécutée d’après
un carton de M. Gest, fournisseur attitré
de l’établissement.
La facture de ce dernier morceau est
très satisfaisante, presque parfaite dans
la représentation des lapis du premier
plan et des costumes, un peu dure dans
le modelé des chairs, avec un coloris
général à la fois puissant et délicat ; mais
sans que la main-d’œuvre soit supérieure
aux autres ouvrages, que M. Braquenié
a fait exécuter dans ses ateliers d’Au-
busson.
Cette seconde exposition de M. Bra-
quenié parait même supérieure à la
première. Elle est, en outre, plus variée.
Une suite des Mois d’après Audran; l’Aw-
tonine et le Printemps, lissés d’après les
carions de M. Ehrmanii; des sièges imi-
tés de Beauvais et dans le goût du
xvine siècle ; VÉchange des deux Reines
d’après Rubens, montrent que les vieux
ateliers de la Marché n’ont pas dégénéré,
alors qu’un Portrait dé Charles IM d’a-
près Van Dyck, se détachant sur un fond
jaune de grand éclat mais d’un goùl dou-
teux, prouve le danger qu’on court à
dénaturer certains chefs-d’œuvre.
M. Ilamot, le seul manufacturier d’Au-
busson qui puisse, au point de vue de la
belle fabrication, soutenir la comparai-
son avec M. Braquenié, a, lui aussi, une
exposition fort remarquable. Parmi les
imitations de pièces anciennes nous rele-
vons l’automne, d’aprèsLebrunJ’Amour
et Psyché d’après Jules Romain, le But
d’après Boucher, qui sont d’une exécu-
tion très satisfaisante.
A titre de curiosité, il convient égale-
ment do citer la reproduction de l’ad-
mirable tapis persan qui, après avoir
fait partie de la collection Goupil, est
allé enrichir le musée des Gobelins.
Cette pièce, extrêmement précieuse, a
été littéralement copiée en trompe-l’œil,
avec ses tares, ses éfaillures et løs irrépa-
rables outrages des insectes et du temps.
C’est un véritable tour de force qu’a ac-
compli M. Hamot, mais un tour de force
dont Futilité est au moins contestable.
Devons-nous ajouter que ce fabricant
nous a paru avoir un goût assez prononcé
pouf les copies fac-similaires ? On re-
marque chez lui des sièges, fauteuils et
chaises, fort bien exécutés du reste, dont
les tons déteints simulent à s’y mépren-
dre la tapisserie ancienne. C’est une con-
cession faite à la passion démesurée que
nos contemporains éprouvent pour le
bric-à-brac, mais que restera-t-il de ces
nuances volontairement affadies quand le
soleil et la poussière auront passé parla?
C’est tout ce que nous trouvons à dire
de la tapisserie; c’est tout cl c’est peu,
et le manque d’enthousiasme que Fin-
düstrie privée met à marcher sur les
traces de nos Manufactures nationales
montre assez que nous n’avancions rien
de trop, en laissant entrevoir l’agonie pro-
chaine de cet art si parfait et d’un inté-
rêt si élevé.
C’est que les conditions de production
de la tapisserie ne répondent plus aux
exigences modernes. De tous les tissus
d’ameublement, c’est le seul qui soit en-
tièrement fabriqué à la main, et sa confec-
tion est d’autant plus lente que sa trame
est plus fine et son point plus serré.
Sans vouloir faire entrer en ligne les
artistes dos Gobelins ou de Beauvais et
leurs- ouvrages impeccables, en nous con-
tentant de spécimens d’une production
courante, de verdures un peu grosses,
encore faut-il un mois à un ouvrier ex-
périmenté pour produire un mètre carré
d’tine tapissöHe relativement commune.
Un mois de travail même aux bords do
la Creuse où la main-d’œuvre est peu
payée, c’est cent cinquante francs pour le
moins, rien que pour l’ouvrier. Ajoutez
vingt francs pour le modèle, vingt autres
francs de, laine et de soie et quarante
francs de loyer, d’intérêts et de frais gé-
néraux. Voilà deux cent trente francs
qu’on doit payer pour un mètre carré
do ces modestes verduvés. Considérez
maintenant ce qu’on peut avoir pour
ce prix en étoffes do soie de Lyon ou
d’ailleurs.
Fàtit-il ajouter qu’à mesure que la ta-
pisserie devient plus finèj sa valeur
augmente à proportion? Au lieu do ver-
dures, veut-on représenter des histoires,
c’est-à-dire des scènes avec personnages,
attributs, etc., on doit employer pôiîr les
carnations et les draperies des artisans
plus habiles qui vont moins vite et que
Ton paye beaucoup plus. Du coup le prix
de revient triple ou quadruple, et ainsi,
en s’élevant graduellement, on arrive peu
à peu à ces tapisseries des Gobelins qui
rovion nent à six mille francs le mètre
carré, et qui en coûtent comme main-
d’œuvre au moins trois mille, car un
habile ouvrier n’en produit guère plus
d’un mètre par année.
La tapisserie, il est vrai, offre ce grand
avantage d’être le plus résistant et le plus
durable des tissus, mais le Code civil a
singulièrement atténué la valeur mar-
chande d’une qualité pareille. La disper-
sion et le partage des meubles à chaque
décès, l’incertitude de nos installations,
la précarité des situations sociales les
mieux établies, sont autant de raisons qui
diminuent chez nous les préoccupations
de ce genre. Jadis on bâtissait etl’on meu-
blait pour plusieurs générations; aujour-
d’hui, tout ménage un peu riche renou-
velle son mobilier dès qu’il a cessé de
plaire.
tJnø autre cause qui vient encore
ajouter à la dépréciation des tapisseries,
c’est la magnificence apparente et le bon
marché relatif des autres tissus d’ameu-
blement.
Si en sortant de l’exposition un peu
triste de Felletin et d’Aubusson, vous
vous rendez clans la section où Lyon étale
ses splendides produits, vous éprouverez
une sorte d’éblouissement, dont les con-
séquènees sont faciles à prévoir.
Ce déploiement de magnifiques étoffes
est singulièrement capiteux. Les velours
de Gênes que fabriquent MM. Léon et
Adrien Emery, les portières brodées dont
M. Henry s’est fait une spécialité, les ve-
lours maillés d’or, les taffetas brochés, et
cannetillés, ornés de bouquets merveil-
leux do fraîcheur, qu’exposent MM. Cha-
tol et Tassinari captivent autrement les
regards que les productions les plus soi-
gnées de MM. Braquenié et lîamot.
Et ajoutez à cela les séductions d’un
bon marché relatif. Les plus superbes do
ces tissus coûtent moitié moins que les
tapisseries de qualité moyenne.
Si de Lyon nous passons à Roubaix,
cette dernière séduction, un peti trop
goûtée en notre temps, prend encore des
attraits plus décisifs. Roubaix, en eilel.,
offre presque à bas prix la contrefaçon
ingénieuse des admirables produits lyon-
nais, et la perfection relative de ces imita-
tions est encore assez grande pour décider
les amateurs d’un luxe peu coûteux.
L’exposition de la maison Van Outryve
et Cie n’est pas seulement, sous ce i apport,
lapins complète quel’onpuisse souhaiter.