L'exposition De Paris 1889
Troisième & quatrième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
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L EXPOSITION DE PARIS
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pour les bâtiments à grande mature etdu
plus fort tonnage. Enfin, le tablier étant
porté sur piliers verticaux cylindriques,
la hauteur de 54 mètres au minimun est
franche >ur toute la largeur d’une travée.
Pour les travées, c’est-à-dire les pas-
sages entre les piles, on a admis trois
types afin de concilier autant que pos-
sible les exigences de la navigation avec
l'économie de premier etablissement du
pont . 1° travées alternées de 300 à
500 mètres; 2° travées alternées de 200
à 350 mètres ; 3° travées alternées de 100
à 250 mètres.
Le métal prévu pour la superstructure
métallique est l’acier ; on l’a choisi parce
qu’il donne une économie de poids de
50 0/0 par rapport au fer, dans des condi-
tions de sécurité absolue, et c’est là un
point capital, caries matières métalliques
à mettre en œuvre et l’outillage à créer
pour la construction du pont représente-
ront un poids d’environ un million do
tonnes, y compris l’outillage dos doux
ports à créer, les nombreux remorqueurs
et chalands spéciaux à construire pour la
mise en place des piles et du tablier, la
double voie, ferrée avec garages. Les
auteurs de l’avant-projet estiment que la
dépense s’élèvera à 860 millions de francs
— mettons un milliard — pour opérer la
jonction de l’Angleterre à la France, c'est
à-dire le réseau des voies ferrées de la
Grande-Bretagne à celui du continent. Il
est presque inutile, do dire qu’on donne
un gage à ceux qui, de l'autre côté du
détroit, rêvent périodiquement l’invasion ;
les travées terrestres du pont seront tour-
nantes, de telle sorte que les communica-
tions par le chemin de. fer pourront être
interrompues au premier ordre. Cela
étant, on ne voit pas une armée française
s’engageant sur le pont; elle aurait la
certitude de trouver sur la côte anglaise
un précipice de 50 mètres do, haut, très
difficile à franchir malgré toutes les res-
sources de l’art militaire. D’ailleurs, si
cette garantie paraissait insuffisante à nos
voisins, on peut leur faire remarquer qu' ils
seront libres d’occuper militairement la
tète du pont à Folkestone et de prendre
telles précautions à leur convenance.
Il me reste maintenant à donner quel-
ques chiffrés sur la valeur économique
du projet. Jo suppose lo pont construit,
les trains circulant, do la côte française à
la côte anglaise. Il faudra alors moins de
six heures pour franchir la distance qui
sépare Paris de Londres. On peut être
sûr quenosvoisiiisd’outre-Manche sauront
en profiter bien vite ; peut-être même
aurous-iious à redôuter une invasion
anglaise toute pacifique, mais nous en
acceptons d'avance les conséquences,
sans, regrets, voire, avec un certain plaisir.
De notre côté, il est à présumer que
nous saurons tirer quelque profil do la
nouvelle voie de communication, bien
que nous ne voyagions guère, nous autres
Français. Certes, de tous les peuples
européens, nous sommes celui qui répu-
gne le plus aux déplacements, et vrai-
ment il est curieux de constater combien
petite est la place qu’il nous faut dans le
monde : ce n’est pas à nous qu'on peut
reprocher d’encombrer les caravansérails
à l’étranger.
Paris est actuellement à huit heures do
Londres, grâce aux progrès réalisés pour
la traversée du détroit, et les Français
semblent ignorer qu’il faut moins de
temps pour aller d’une capitale à l’autre
que do Paris à Lyon. Je sais bien que la
traversée du Pas-de-Calais effraye bien
des gens, qu’elle est quelquefois très
dure, souvent désagréable : ceux qui ont
le mal de la mer ne le savent que trop,
ceux qui ne l’ont pas jouissent pendantlc
passage d’un spectacle peu réjouissant.
Néanmoins, la voie ferrée établie, je crois
que le reflux des voyageurs français sera
inférieur au flux des Anglais ; d’une part,
nous sommes casaniers, tandis que nos
voisins le sont peu; d’autre part, la vie
est plus facile et moins coûteuse chez
nous que sur l’autre bord do la Manche.
Quoi qu’il en soit, il est certain que le
mouvement des voyageurs sera très
important entre les deux pays, mais il est
certain aussi que c’est sur le mouvement
des marchandises que les promoteurs de
l’entreprise comptent surtout pour rému-
nérer les capitaux nécessaires pour la
gigantesque construction qui doit relier
la France à l’Angleterre.
En interrogeant les statistiques du
Board of tråde et de notre ministère du
commerce, on admet que le seul trafic do
F Angleterre avec la France, la Hollande,
la Belgique et l’Allemagne s’est élevé,
en 1885. à 14 millions do tonnes, répar-
ties en quatre catégories. Il convient évi-
demment d’éliminer du transport qui
passera par le pont, les marchandises
lourdes, encombrantes et do peu de
valeur relative, lesquelles continueront
à suivre la voie de mer. Reste alors
6,500,000 tonnes qui sembleraient devoir
former le contingent annuel du chemin
de fer.
Los promoteurs du pont l abaissent
cependant à 5 millions, tandis qu ils ne
prennent qu’un million de voyageurs sur
les deux qui traversent annuellement le
détroit, et c’est sur ces deux chiffres qu ils
se basent pour affirmer que l’entreprise
serarémunératrice. On ne peut, d ailleurs,
faire que des hypothèses sur ce point.
Cet exposé fait, il faut dire quelques
mots des objections qu’on opposera à la
construction du pont. Ce qui parait sou-
rire beaucoup aux métallurgistes anglais,
c’est la perspective d’avoir à fournir un
demi-million de tonnes d’acier, le projet
admettant que chaque pays construira
une moitié de l’ouvrage; on peut donc,
avoir l’assurance qu’ils seront de chauds
défenseurs du projet; toutefois, il ne faut
pas se faire d’illusions, des esprits inquiets
se refuseront à l’accepter, de l'autre côté
du détroit, tout simplement parce que
l’Angleterre ne sera plus une lie dans
l’acception absolue de ce mot. De plus, ils
se retrancheront derrière les dangers que
les piles feront courir aux navires qui fré-
quentent ces parages. Getto fois, l’objec-
tion ne sera pas sans valeur; il serait en
clîet imprudent d'affirmer que, malgré la
largeur dos portées, aucun navire no se
perdra contre les énormes piliers du pont.
On prendra, il est vrai, toutes les précau-
tions imaginables; on éclairera les passes,
on y installera des sirènes de brunie, mais
il s’y perdra de temps à autre quelque bâti-
ment, moins cependant que ne le diront
les adversaires du pont. Des passes de
300 à 300 mètres sont assez larges pour
qu’on ne s’arrête pas trop à la crainte de
sinistres nombreux.
11 est possible aussi que des puissances
maritimes soutiennent la thèse que, le
Pas-de-Calais étant un passage inter-
national, les riverains n’ont pas le droit
d’y entreprendre des travaux qui consti-
tueront une gêne, quelque petite qu’elle
soit, pour la navigation. Il faudra alors
chercher aies convaincre et à obtenir leur
adhésion : ce sera à la diplomatie à aider
les hommes entreprenants qui croient à la
réussite du projet. Pour notre part, nous
nous contentons d’exposer impartialement
le pour elle contre de cette grande entre-
prise, sans en méconnaître les difficultés
d’exécution etennousretranchantderrière
l'autorité de MM. Schneider, Hersent,
Fowlcr et Benjamin Baker.
D’ailleurs, la question est posée devant
les sommités industrielles et scientifiques
de l’Angleterre et de la Franco.
A sa récente réunion à Paris, XIron
and Steel Institute a consacré une de ses
séances à cette importante entreprise et.
sans la discuter dans tous scs détails, elle
a montré qu'en principe elle lui était sym-
pathique. Notre Société des ingénieurs
civils vient d’en être saisie etla discutera
avec sa haute compétence ; il serà, intéres-
sant de savoir ce qu’elle en pense.
E. Weya.
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