ForsideBøgerL'exposition De Paris 188…quatrième volumes réunis

L'exposition De Paris 1889
Troisième & quatrième volumes réunis

År: 1889

Forlag: A La Librarie Illustree

Sted: Paris

Sider: 324

UDK: St.f. 061.4(100)Paris

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L’EXPOSITION DU JAPON Sourire et promesse de la vieille Asie figée dans son immobilité hiératique, le Japon, impatient d’agir, avide de civilisation, s’est brusquement dégagé, depuis la révolution de 1868, des liens du passé. Ils l’enserraient, comme les bandes sans fin enserrent la momie moulée, dans sa séculaire attitude; ils l’étouf- faient et le paralysaient, et il voulait vivre. Du pouvoir autocratique et despotique, il a passé au dualisme du Siogound et du Mikado, du chef militaire et du grand prêtre, puis au régime féodal des Daimios, doublant. les étapes, forçant sa marche, s’attardant le moins possible à ces formes surannées du gouvernement qui ralentissaient son élan, rêvant, les yeux fixés sur l’Europe, de prendre place, lui aussi, parmi les nations libres. Ses rêves deviennent des réalités. Curieux de voir, de comprendre, d’imiter, doué d’une incroyable mobilité d'esprit, le Japonais s’assi- mile sans efforts les idées, les coutumes et jusqu’au costume de l’Europe. Dans ses ports nombreux notre civilisation s’infiltre. Isolé, par la mer, de l’Asie à laquelle il confine, dont longtemps il a subi l’influence, l'empire du Soleil-Levant n’a ni la structure compacte et profonde de la Chine, ni les contours massifs Je l’Inde anglaise. Il forme un vaste fer à cheval dont la partie concave fait face à l’Asie. La pointe nord s’infléchit vers la Mantchoarie, la pointe sud vers le continent dont la sépare le détroit de Corée. Ce fer à cheval encercle une mer, dite mer Intérieure ou du Japon, dont la plus grande largeur atteint 240 lieues marines; aux deux extrémités, cette largeur varie entre 50 et 100 lieues. Ce ne sont que des lies, enche- vêtrées les unes dans les autres, séparées par de petits bras de mer, et dont le nombre dépasse 3,800. Au centre de cet archipel s’étend Fîle de Nippon, qui mesure environ 300 lieues de long sur 70 de large en moyenne. L'archipel se développe sous la même latitude que la France et l’Espagne, mais le climat, dans la partie nord, est relativement plus froid, ce qui est dû au voisinage de la mer d’Ochotsk et aux vastes banquises qui se détachent périodiquement des zones polaires. Le sol est montagneux, accidenté, bien arrosé. La formation géologique est évidemment volca- nique et se rapproche beaucoup, sous ce rapport, de la structure des archipels Océaniens. Là, commence la Polynésie, les volcans s’éteignent peu à peu ; seul le Fusi-Gama donne encore signe de vie. Partout ouvert, de tous côtés accessible aux idées modernes que le navigateur européen promène sur les mers, sème dans les ports, le Japon s’en est imprégné. Sur ce sol propice, habité par une population de plus de quarante millions d’habitants, elles ont pris racine, germé et grandi. Nous assistons à leur éclosion. Dans les vastes travées du Champ de Mars et dans les jardins du Trocadéro, deux Japons profondément distincts se révèlent aux yeux de l’observateur. L’un moderne, aux productions agricoles, aux matières premières et fabriquées, savamment et méthodiquement classées; l’autre capricieux et fantaisiste, curieux et charmant, œuvre d’incomparables artistes. Le passé et le présent s’y coudoient, et le passé surtout attire et fixe les regards. A le renier, à l’abandonner le Japon perdrait, avec son originalité, le côté le plus saillant de son génie. Le monde n’a pas seulement besoin de produits agricoles, il lui faut aussi l’art qui embellit ce qu’il touche, qui charme les yeux et aux objels les plus usuels donne ces formes gracieuses qui en rehaussent le prix et en poétisent l’usage. En cet art, le Japon excelle. Libres dans leurs allures, puisant aux sources vives de la nature leurs meilleures et leurs plus exquises inspirations, ses artistes semblent se jouer des difficultés. Sous leurs doigts agiles le bronze et l’ivoire assouplis, contournés, minutieusement ciselés prennent les formes les plus imprévues, toujours gracieuses et charmantes. Nul eflort pour suivre en ses capricieux méandres l’idée qui les mène, l’idéal auquel ils aspirent. En quelques traits leur pinceau savant fait revivre sur la toile ou le papier un paysage curieux et bizarre, d’une notation et d’une tonalité rapide et sûre. Leurs yeux obliques embrassent et caressent, mieux que les nôtres, les contours d’un vase dans les courbures duquel fuient des papillons nacrés, des fleurs aux tiges souples merveilleusement teintées, des oiseaux éployés nageant dans un vaporeux lointain. Amants passionnés de la nature, ils l’inter- rogent et la suivent; ils lui demandent de les initier à ses mystérieux effets, à ses harmonieux contrastes. Observez dans ces laques, aux reflets veloutés et profonds, ces saillies légères, fruits et fleurs, animaux fantastiques et paysages sobrement indiqués; suivez sur ces riches écrans brodés avec un art merveilleux, les puissantes nervures des troncs d’arbres, les den- telures des feuilles, les délicates corolles des fleurs épanouies sur les lianes, semées sur un fond d'or ou de pâle verdure; partout vous retrouverez l’observation profonde et patiente, la reproduction vraie de la nature dont l’image fixée sur la rétine de l’œil de l’artiste ou de l’artisan guide sa main et revit sous elle. Sur les stores légers qui tamisent la lumière suivez le rêve asiatique qui, sous vos yeux, se déroule. Notez ces fantastiques effets d’ombre et de lumière, ces monstrueux yeémas aux croupes frémissantes ou ces danseuses déployant leur longue théorie de costumes éclatants, le bas du visage voilé de leurs éventails au-dessus desquels brillent des yeux agrandis avec art. Derrière elles voyez s’avancer, escortée de serviteurs et de servantes, cettejeune courtisane ou grande dame, promenant sur la foule son indéfinissable et hautain sourire. Tout cela donne l’illusion de la vie et de la vérité. Entre l’art chinois et l’art japonais la diffé- rence est grande. Si les procédés sont anlogues, les conceptions sont autres, autres aussi les résultats. Entre le Chinois réfractaire aux idées nouvelles, lent à s’ébranler, invinciblement atta- ché aux mœurs, aux coutumes, aux traditions du passé, et l’excessive mobilité du peuple japo- nais, prompt à s’engouer, à inventer, à créer, à copier, le contraste est profond ; leur art le révèle. Contraste non moins curieux et non moins significatif, le Japon n’a pas, comme la Chine et l’Inde, comme 1’Annam et le Tonkin, comme les républiques du Sud-Amérique, édifié dans l’enceinte de l’Exposition un palais ou un pavil- lon spécial. Nul mieux que lui pourtant n’eût pu ou su le faire, étaler à nos yeux émerveillés la Pagode de Nikkô, ou, dans un paysage japonais, reconstruire le temple d’Hatchiman à Kamakoura, et, de ses vastes galeries aux rouges boiseries, faire à son exposition artis- tique un cadre original et merveilleusement approprié. C’est dans les travées du Champ de Mars qu’il a voulu figurer, près de l’Europe et, comme elle, dédaigneux, semble-t-il, du grand effet qu’eût produit, dans un palais à lui, chef- d’œuvre de son architecture, l’étalage de ses richesses. Mais le Japon n’est pas tout entier au Champ de Mars. Pour achever de le voir et de le com- prendre, il faut le suivre dans les jardins du Trocadéro. Tout d’abord son arl horticole étonne et déconcerte. On s’arrête devant ces produits bizarres et contournés d’une sylviculture sa- vante, ingénieuse à dompter la nature, à la rame neraux formes les plus minutieuses, devant ces cèdres qui comptent plus d’un siècle d’existence et n’atteignent pas même la taille d’un enfant. Tordus par d’invisibles orages, courbés sous le poids des ans, ils reproduisent, dans leur végé- tation contenue, repliée sur elle-même, les for- mes capricieuses que la nature imprime aux plus hautes ramures. Des générations d’hommes se sont succédé, nouant délicatement ces bran- ches, comprimant le puissant effort de la sève, contraignant ces géants de la forêt à vivre, à se développer dans quelques pieds carrés. Ce qu’il a fallu de patience et de soin pour obtenir cet étonnant résultat, on ne le comprend qu’en le voyant; et telle est l’illusion produite, telle la perfection des formes, tel aussi le port hautain de ces colosses ramenés aux proportions d’un jouet, que l’on admire, quoi qu’on en ait, cette végétation assouplie, soumise, obéissant au caprice de l’homme. Ce goût, qui nous paraît bizarre, ce caprice, qui nous semble puéril, est une des faces diver- ses et multiples de leur passion dominante. Ils veulent, jusque chez eux, dans leurs palais et dans leurs chambres étroites, aux cloisons de bambou, la reproduction exacte et fidèle de la nature, l'illusion des hautes futaies qui couron- nent leurs collines, ombragent leurs cimetières ; il leur faut reposer leurs yeux sur une miniature de jardin d’enfant, aux ponts branlants hardi- ment jetés sur un mince filet d’eau. Il leur faut l’illusion des lacs et des allées ombreuses, des rochers et des kiosques. Vous trouverez tout cela au Trocadéro et, après avoir regardé, une curiosité, naïve comme la leur, comme la leur satisfaite et amusée, succédera au sourire légè- rement ironique né du premier coup d’œil. C’est que tout sentiment vrai éveille un écho, et qu’aucun sentiment en eux n’est plus sincère et plus vrai que celui que la nature leur inspire. A côté du Japon fantaisiste, exotique et artis- tique, le Japon moderne étale scs matières premières et ses produits fabriqués. Productions encore à l’état de germe; culture, par contre, avancée et savante. Le jour approche où l’Empire du Soleil-Levant occupera un rang important comme pays producteur, où ses soies et ses soieries, ses étoffes et broderies, ses meu- bles et sa céramique, ses bronzes et ses laques feront l’objet d’un, commerce important. Déjà ces derniers envahissent l’Europe sous la forme de bibelots et de curiosités. Nos grands maga- sins en regorgent et les écoulent: on les retrouve dans les plus humbles demeures qu’ils égaient, chez les plus modestes auxquels ils donnent l'illusion d’un art exotique, auxquels ils parlent de pays lointains, d’une civilisation autre que la nôtre, d’une conception différente de la vie. Que donnera, dans un siècle d’ici, la greffe occidentale implantée sur ce tronc japonais débordant de sève et de vie? La greffe étran- gère absorbera-t-elle toute lasève et lesbranebes de l’arbre primitif, vermoulues et flétries, ne donneront-elles plus ni fleurs ni fruits ! Ce sei ait